Le test des NNormal Kjerag Brut : grosse accroche pour terrains gras !

La Kjerag Brut vient s’ajouter à une gamme encore restreinte, où la Kjerag occupe une place centrale. Pensée comme une chaussure minimaliste et performante, la Kjerag s’adresse aux coureurs capables de l’emmener vite (mais pas trop loin), sur des terrains roulants comme techniques. La nouvelle Kjerag Brut conserve cette philosophie de légèreté, mais avec une ambition différente : offrir une alternative plus mordante, notamment quand les conditions deviennent humides, boueuses, grasses.

Cette approche rappelle ce qu’avait initié Salomon (sous l'impulsion de Kilian, je ne saurais dire) à l’époque des S/Lab Sense, avec deux déclinaisons selon les conditions : hard ground et soft ground. Ici, la Kjerag Brut se positionne clairement du côté “soft” voire muddy.

Les caractéristiques du produit

Dès la première prise en main, on retrouve la patte NNormal : légèreté et sobriété. La Brut affiche 226 grammes sur la balance, un poids très contenu compte tenu des crampons de 6,5 mm — presque 7 mm — qui ornent la semelle Vibram Megagrip Litebase.

La tige est toujours en Matryx, ici dans une version “micro” encore plus fine. Très peu de renforts, une languette minimaliste, pas de poche à lacets, pas de semelle de propreté non plus, remplacée par un insert directement collé sur la mousse intermédiaire. L’économie de matière est partout, jusqu’à la finition, sobre, quasi brute de décoffrage.

La semelle intermédiaire est la même que sur la Kjerag de base : "Eexpure", un EVA infusé.

Le drop est correct (6 mm), la semelle intermédiaire est toujours en mousse EExpure, ferme mais avec un soupçon de réactivité. Côté chaussant, le volume à l’avant reste suffisant pour bouger les orteils, tandis que le maintien est assuré par un ajustement précis et un bon calage du talon.

Le laçage est très efficace, avec des lacets crantés et peu élastiques. La languette est fine et requiert d'être bien ajustée sur le coup de pied. Le renfort en TPU sous les oeillets est gage d'un bon maintien. Le deuxième oeillet permettra d'encore mieux caler la tige sous la malléole.

Le test terrain

Il faut bien desserrer les lacets et largement tirer pour enfiler la chaussure, mais une fois en place, le pied est maintenu. Malgré l’absence de rembourrage, le maintien reste étonnamment efficace, j'associe ça au contrefort qui monte assez haut sous la malléole, sans pour autant générer d’inconfort. En tout cas je n'ai pas perçu de gêne après 3 sorties d'une dizaine de kilomètres. J'estime que c'est lié à la tige qui est très fine, et au contrefort qui possède peu de structure.

L'accroche, c’est évidemment le point fort de ce modèle. Les crampons larges et profonds (6.5mm c'est pas mal) mordent bien la boue, mais restent assez plats pour conserver un minimum d’adhérence sur la roche. L’accroche est excellente, même s’il aurait été intéressant de retrouver des chevrons inversés sur la partie externe de l’avant-pied, pour améliorer encore le grip sur les appuis extérieurs en descente. C'est le genre de chose que j'aime bien voir sur les chaussures, autant optimiser les choses jusqu'au bout sur un produit avec de l'ambition comme celui-ci. Mais enfin, Kilian a gagné Zegama avec cette Kjerag Brut.

La Kjerag Brut reste une chaussure exigeante. Il faut l’emmener avec une foulée dynamique pour en tirer le meilleur. Elle tape un peu (selon les normes actuelles), surtout en descente ou sur les parties dures, mais elle conserve une bonne précision, une excellente agilité. C’est une chaussure joueuse, réactive, avec laquelle on peut vraiment s'amuser si on a un bon pied et une bonne lecture du terrain. La sensation sous le pied reste assez ferme, sans effet trampoline : on est plutôt sur du direct, du nerveux, et il sera difficile de faire plus de 60 km avec elles. Tout le monde n'est pas Kilian.

Avec son poids plume et son faible amorti, la Kjerag Brut s’adresse à des sorties courtes à moyennes distances. Pour du 20 à 40 km, en course ou à l’entraînement, elle est parfaitement adaptée. Au-delà, il faudra un pied bien préparé, et une foulée légère. Elle trouvera toute sa pertinence sur terrains gras, l’hiver ou dans les forêts humides, mais reste polyvalente grâce à l’adhérence de sa semelle. Je la conseille vraiment, si vous avez les moyens, pour les sorties courtes en forêt, pour s'entrainer ou prendre plaisir sur les terrains techniques, en alternant avec des chaussures plus amorties pour les sorties longues ou sur les terrains roulants.

Le seul bémol, pour moi, vient de l’absence de semelle de propreté. Le pied est en contact direct avec une matière légèrement abrasive, qui tend à accrocher la chaussette. Cela peut contribuer au maintien, mais crée aussi une sensation de friction, voire un léger échauffement sur des sorties plus longues. À surveiller.

Conclusion

Pour moi, la NNormal Kjerag Brut est presque une nouvelle chaussure à part entière, une déclinaison cohérente d’un modèle qui a déjà trouvé son public. Plus technique, plus mordante, elle garde l’esprit de légèreté et de sobriété propre à la marque, tout en élargissant les possibilités d’usage. Si vous aimez la Kjerag, que vous courez souvent dans la boue ou les conditions humides, cette version Brut pourrait bien trouver sa place dans votre "rotation". Pour les longues distances ou les terrains trop rocailleux, elle reste limitée, mais dans son domaine, elle fait le job - sans fioritures.