Une légende bien étrange
Cela fait longtemps que j'entends parler du Trail des Deux Amants. De nombreux copains traileurs l'ont couru, et les Normands en parlent souvent comme le rendez-vous de début de saison. Au début du mois d'avril, c'est un bon exercice pour le traileur qui souhaite monter en puissance pour les objectifs plus exigeants de l'été. On est aussi tout près de Paris, une bonne occasion de faire le déplacement pour un weekend. J'ai couru le 46 km, un bon compromis alors que je n'avais pas beaucoup travaillé l'endurance à pied cet hiver. Récit de course !
📷 Le Trail des 2 Amants, le 46k. Récit de course ! | Une légende bien étrange
La course a lieu dans l'Eure, à quelques kilomètres en amont de Rouen sur la Seine. À cet endroit, le fleuve fait des méandres. Il a creusé son lit au fil des centaines de milliers d'années dans un plateau de craie, le même qui s'étend de Paris à Étretat. En rognant sur les côtés, il a créé les falaises qui servent de terrain de jeu aux traileurs de la région. C'est aussi ce terrain qu'a choisi David Leclercq, l'organisateur de l'événement, en traçant le parcours du Trail des Deux Amants au départ de Pitres, en direction des coteaux de la Seine puis sur une large boucle sur le plateau en passant par les villages de Bonnemare, Radepont, Romilly-sur-Andelle. L'Andelle, une rivière que nous croiserons plusieurs fois avant qu'elle ne se jette dans la Seine non loin de l'arrivée de la course.
Vue sur le lac des 2 amants, la Seine, et la côte des 2 amants au loin. Sur la gauche au fond, le village de Romilly-sur-Andelle.
Le clou du spectacle, c'est la Côte des Deux-Amants, qui a évidemment donné son nom à la course. Avec un dénivelé de 100 mètres, ce n'est pas tant pour sa difficulté que pour la légende qui l'accompagne que la côte est connue. J'en ai fait une petite interprétation personnelle dans ma vidéo ici.
L'événement propose 4 formats, aux distances bien étagées, de 15 à 65 km. Ainsi :
- Gran'tda 65 km (66.4 km, 2115 m d+)
- Mara'tda 45 km (48.2 km, 1359 m d+)
- Aventur'tda 25 km (24.8 km, 715 m d+)
- Découv'tda 15 km (15.4 km, 383 m d+)
Je jette mon dévolu sur le parcours de 46 km. Je sors d'un hiver runnistiquement peu studieux, et je ne suis pas encore prêt pour les distances plus élevées. C'est déjà bien. On misera sur les prochaines échéances du printemps pour allonger les distances, car l'objectif de l'année se trouve quelque part dans les Alpes fin août, entre Courmayeur et Chamonix.
La course
Il faut compter 4km de plat avant d'attaquer les falaises.
Le départ de la course, et de tous les formats d'ailleurs, a lieu dans le stade de Pitres. On peut y retirer son dossard jusqu'à 15 minutes avant le coup de feu ; c'est bien pratique, car j'étais occupé la veille. J'aime aussi arriver assez tôt avant le départ, cela permet de se mettre dans l'ambiance, et de rencontrer les autres coureurs. Le départ du 46 km a lieu à 7h30, c'est raisonnable lorsqu'on n'a pas trop de route à faire (15 minutes dans mon cas). Je loge pour 2 nuits dans un chalet sur le Parc De Lery-Poses en Normandie, une base nautique que je recommande. Je n'aurai pas le temps de voir Aurélien Collet qui court le 65 km (et qu'il va gagner), mais je prends le temps de discuter avec le speaker de l'événement (dont j'ai oublié le nom), ainsi qu'avec Aurélie Berthe (Lilicornerose sur YT).
Le petit panneau "TRAIL" indique que nous sommes sur un des parcours de la station de trail "Rouen-Seine-Eure".
La station de Trail "Rouen-Seine-Eure": À seulement 1h de train de Paris, avec Rouen comme port d'attache, la station propose une diversité de parcours et de paysages, oscillant entre le charme urbain du centre-ville de la ville aux 100 clochés et les panoramas sympathiques des coteaux de la Seine. Ce sont deux univers distincts, pour un total de près de 15 itinéraires à termes, qui s'offrent aux coureurs :
- d'une part, l'exploration urbaine de Rouen et ses monuments historiques, ou la montée de la côte Sainte-Catherine le spot des traileurs Rouennais;
- d'autre part, l'ambiance plus sauvage et sportive de la base nautique de Léry-Poses en Seine Eure, où les trails conduisent les aventuriers à l'assaut de la côte des Deux Amants.
Les premiers kilomètres de la course permettent d'étirer le peloton, c'est toujours important avant d'entrer sur les sentiers. Ici, c'est également imposé par la topographie. Pitres est dans la plaine, et les premiers coteaux visibles au loin nécessitent quelques foulées, de fait. On longe la Seine pendant quelques kilomètres en empruntant les mêmes sentiers que la Station de Trail (point de départ sur la base nautique de Lery-Poses), avant d'enchaîner les premiers raidards de début de course.
Les montées ne sont pas très longues, mais très sèches. Je m'attendais à un terrain plus humide, alors que les dernières semaines ont été très pluvieuses, mais à ma surprise c'est plutôt sec. Je pense que c'est lié au sol dur et caillouteux des falaises, mais aussi à l'exposition des coteaux qui profitent du vent qui emprunte le lit de la Seine. Cela sera moins le cas vers le milieu du parcours lorsque nous emprunterons des sentiers plus encaissés en forêt.
Les 45 km sont découpés en 3 parties :
- les 5 premiers et derniers kilomètres, très plats et roulants, pour quitter et rallier le départ de Pitres ;
- les quelques yoyos sur les coteaux, qu'on trouve entre les 5e et 10e km puis du 30e au 40e km ;
- au milieu, on est sur les plateaux, en traversée de champs et villages : c'est assez roulant, goudronné également entre Radepont et Romilly-sur-Andelle.
Après une dizaine de kilomètres, et les montées raides en coteaux qu'on exécute 3 ou 4 fois, on accède au plateau en direction du premier ravito. Au programme, traversée de lieux-dits et de champs, et quelques bois humides. C'est assez roulant, ondulant, et il faut pouvoir relancer sans trop forcer car il reste encore 30 kilomètres. Arrive enfin le premier ravito après 20 km de course, dans le village de Bonnemare à l'entrée du château du même nom. Je ne peux que penser au personnage de la légende, Raoul de Bonnemare, qui était sans doute d'ici.
La légende : Il y a fort longtemps, au XIVe siècle peut-être, à l'époque des Rois maudits (oui, le Trail des Rois Maudits, une des nombreuses courses de trail dans l'Eure), le jeune Raoul tomba amoureux de la belle Mathilde. C'était la fille de Robert de Canteloup, seigneur local sans doute. À cette époque il fallait que le père donne la main au prétendant, c'était ainsi. La condition imposée par Robert : porter Mathilde au sommet de la colline. Raoul, amoureux fou, s'exécute, mais meurt d'épuisement au sommet. De tristesse, Mathilde se jette du haut de la falaise. Le papa, abattu, lui offre une belle sépulture. 700 ans plus tard les traileurs du coin créent le Trail des Deux Amants.
Le premier ravitaillement après 20km, au château de Bonnemare.
Après Bonnemare, on attaque la seconde partie de la course. C'est toujours assez roulant, et varié. La course est parfaite pour celui ou celle qui recherche une variété de terrains, les fortes montées du début, les traversées de champs, les forêts de feuillus, et les routes qu'il ne faut pas négliger. Vivant en montagne, je suis à l'aise en montée, encore plus en descente, mais je peine un peu sur les passages de bitume, le long de l'Andelle (affluent de la Seine) comme au niveau de l'Abbaye Notre-Dame de Fontaine-Guérard, et sur la traversée de Romilly-sur-Andelle.
Je retrouve avec plus d'entrain les contreforts de la Seine avec les deux dernières montées sur le plateau. À ma surprise, je suis nettement plus à l'aise que les autres coureurs de mon niveau en montée, et surtout dans les descentes. Ce n'est pas commun pour moi, le signe sans doute que :
- Je ne suis pas à mon niveau car je termine dans la seconde moitié du peloton ;
- Le fait de vivre à la montagne me donne un avantage en montée (et les globules rouges) ;
- Mes qualités de sanglier ne se perdent pas trop dans les parties pentues et techniques.
Vue sur la Seine et le Parc de Lery-Poses en Normandie. Je logeais dans un chalet, dans le parc, qui est aussi le point de départ de la Station de Trail des 2 amants.
On termine la course par la montée de la côte des deux amants, pour une dernière vue sur la vallée de la Seine et la confluence avec l'Andelle. On voit au loin Pitres et le gymnase où se trouve l'arrivée. La fin du parcours reprend le même sentier en bord de Seine, et comme toujours en fin de course, c'est difficile.
Je finis en 6h40, assez loin de ce que je peux espérer avec une bonne forme, mais ce n'est que le début de la saison. Je le vois comme une préparation pour les objectifs qui arrivent, avec un gros objectif à la fin du mois d'août : la TDS.